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Infections ostéo-articulaires : diagnostic et traitement

Bilan diagnostique

La prise en charge d’une infection ostéoarticulaire nécessite une stratégie globale, basée sur un bilan clinique et paraclinique complet.

 

Bilan clinique

L’examen clinique va permettre dans un grand nombre de cas d’affirmer l’infection. Dans certains cas, on peut observer une cicatrice postopératoire manifestement inflammatoire, avec rougeur voire, à l’extrême, désunion de la cicatrice et écoulement purulent. Quand articulation est dite « superficielle », comme par exemple au genou, le diagnostic d’infection peut être affirmé, là aussi, assez facilement cliniquement. Il y aura alors un épanchement, pouvant être mis en évidence à la palpation, ainsi qu’une augmentation de la chaleur cutanée. Ceci, dans un contexte évocateur (fièvre, frissons…), signera alors une infection (même si, on le verra plus loin, le diagnostic de certitude repose impérativement sur la mise en évidence d’un germe lors des analyses bactériologiques).

 

Le bilan clinique permettra également de préciser :

•            le retentissement général de l’infection. Le patient est-il en sepsis sévère, voire en état de choc ? C’est-à-dire, y a-t-il une répercussion au niveau du système cardio-vasculaire ? Ceci se manifeste par un trouble de la conscience, une tachycardie, une baisse sévère de la tension. Cette urgence absolue est un des rares cas où il peut arriver de débuter les antibiotiques sans avoir fait une documentation bactériologique auparavant.

•            Les causes, ou « porte d’entrée » de l’infection. On l’a vu, une effraction cutanée peut constituer le moyen d’entrée du germe. Il faut donc examiner le sujet à la recherche de plaies, escarre, ou autres lésions (intertrigo, mycoses…). Il faut également rechercher un souffle cardiaque apparu récemment, qui pourrait témoigner d’une endocardite infectieuse (infection d’une valve cardiaque, qui envoie des emboles sceptiques dans différentes parties du corps).

 
Bilan paraclinique

•            prise de sang :

Il est habituel de pratiquer une prise de sang avec numération - formule sanguine et CRP. En cas d’infection, on constate généralement une augmentation des globules blancs, et une élévation de la CRP. Ces paramètres peuvent ne pas être augmentés en cas d’infection, ou augmenter secondairement, avec un décalage. C’est surtout l’étude de leur diminution après traitement qui sera un facteur de surveillance important.

•            Imagerie :

Il est habituel de réaliser des radiographies standard centrées sur l’os ou l’articulation en question. On recherche des signes d’ostéite (témoin d’une infection chronique) ou d’épanchement articulaire, en cas d’arthrite. On recherche d’éventuels corps étrangers ayant pu provoquer ou pérenniser l’infection. Enfin, en cas de matériel (prothétique ou d’ostéosynthèse), on étudie une éventuelle modification de la fixation de celui-ci à l’os du fait de l’infection.

Actuellement, il faut au moindre doute s’aider d’un scanner, pour étudier la qualité de la fixation d’une éventuelle fracture, ou rechercher des signes d’ostéite. En cas de doute sur une arthrite, une échographie ou un scanner permettra d’apporter des arguments décisifs.

L’I.R.M. est plus rare, mais permet dans certains cas douteux de mettre en évidence une infection osseuse étendue (ostéomyélite par exemple).

 

Prise en charge

Le traitement consiste impérativement en l’association d’une intervention chirurgicale et d’une antibiothérapie.

 

Antibiothérapie

Sans rentrer dans les détails des différentes molécules utilisées, certains grands principes concernant l’antibiothérapie sont à connaître. Dans le cas d’infection ostéoarticulaire, l’antibiothérapie doit impérativement être ciblée sur le germe responsable.

Ceci montre bien l’importance de systématiquement mettre en évidence ce germe. Il faut donc impérativement s’abstenir, en cas de constatation d’une infection manifestement en regard d’un matériel orthopédique, d’« envoyer » des antibiotiques à l’aveugle. L’urgence est, au contraire, de réaliser un prélèvement profond (ponction articulaire, ou prélèvement osseux réalisé lors de la chirurgie) avant de débuter l’antibiothérapie. En effet, en cas d’antibiothérapie débutée avant prélèvement, il y a un risque que le liquide prélevé contienne également des antibiotiques, qui risquent d’altérer les germes avant qu’ils aient pu être mis en évidence au laboratoire de bactériologie.

Après le prélèvement, les analyses mettent généralement 1 à 2 jours avant de pouvoir authentifier le germe, et autant avant de pouvoir connaître l’antibiogramme (qui montre à quels antibiotiques le germe est sensible). On débute donc généralement une antibiothérapie dite « à large spectre » en urgence, dès les prélèvements réalisés, et les antibiotiques sont alors adaptés aux germes secondairement, après réception des résultats.

Cette antibiothérapie est généralement basée sur une association de 2 antibiotiques, possédant une bonne diffusion osseuse. La durée est généralement de 1 mois ½, mais est à moduler pour chaque situation clinique.

Parfois, des antibiotiques relativement puissants sont utilisés. Il faut alors surveiller de manière attentive l’absence d’effets secondaires au niveau des autres organes (risque d’insuffisance rénale, de complication hépatique, c’est-à-dire au niveau du foie, nausées – vomissements, allergies, etc…).

 

 

Prise en charge chirurgicale

Les modalités précises dépendent bien entendu de la situation propre aux patients, du site infecté (os, articulation), etc.

•            Infection sur une prothèse articulaire.

Il s’agit d’une situation relativement complexe. En cas d’infection dite « récente » (c’est-à-dire moins de 1 mois, environ, depuis la contamination), il est possible de traiter l’infection par un « lavage » chirurgical simple. En revanche, quand l’infection évolue depuis une période plus importante, les germes au contact du matériel métallique produisent un « biofilm », qui va progressivement les recouvrir. Il s’agit d’une barrière hermétique empêchant l’action des antibiotiques à ce niveau-là. Seule une excision chirurgicale peut permettre, dans ce cas, de traiter l’infection. Il faut donc retirer tous les implants prothétiques, et « gratter » toutes les interfaces entre l’os et l’ancienne prothèse. À noter que c’est généralement à ce niveau-là que les prélèvements bactériologiques sont les plus rentables.

Après ce nettoyage chirurgical, il faut songer à la reconstruction. Dans la plupart des cas, il est possible de réimplanter une prothèse immédiatement. Mais, dans certaines situations, il faut passer par une étape avec mise en place d’un « espaceur » en ciment chirurgical, pendant plusieurs semaines, avant de pouvoir réimplanter la prothèse définitive.

Dans certaines situations, heureusement rare, par exemple en cas d’échec répété, il n’y a parfois pas d’autres solutions que de réaliser une arthrodèse, c’est-à-dire le blocage définitif de l’articulation.

 

•            Infection sur matériel d’ostéosynthèse

La fixation des fractures nécessite la mise en place de matériel d’ostéosynthèse métallique. Il peut s’agir de vis, de plaques avec vis, de clous passés dans la cavité médullaire des os, etc. Tout ce matériel est susceptible de s’infecter, car les germes ont un tropisme particulier pour le matériel métallique. De plus, dans un contexte de traumatologie, le risque d’infection un peu augmenté (contexte d’urgence, avec, parfois, une moins bonne préparation cutanée, pas de possibilité de douche Bétadinée la veille, etc.).

Comme pour le cas des prothèses, le traitement de l’infection passe par un nettoyage soigneux, après avoir retiré la totalité du matériel. Quand la fracture sous-jacente est déjà consolidée, la situation est relativement simple, et le pronostic très bon.

Quand, au contraire, la fracture sous-jacente n’est pas consolidée, la situation est plus complexe. En cas d’évolution depuis plusieurs mois, on parle de pseudarthrose, ici qualifiée de « pseudarthrose septique ». Ceci signifie que le foyer de fracture et contaminée par un germe, le traitement va donc nécessiter de nettoyer toutes ces régions infectées. La difficulté est représentée par le fait que cette excision entraîne une possible perte de substance osseuse importante, et l’on est face à un double challenge : le comblement de cette perte de substance, et l’obtention de la consolidation. Ceci passe généralement par une greffe osseuse, prélevée chez le même patient, au niveau d’un site où cet os n’est pas indispensable (ailes iliaques notamment). Il faut également fixer l’os, pour espérer une consolidation. Mais, dans un contexte sceptique, l’on rechigne habituellement à implanter un matériel métallique trop volumineux. L’ostéosynthèse passe alors généralement par un fixateur externe, même si l’emploi de plaques ou de clous centro-médullaires n’est pas strictement contre-indiquée. Là aussi, chaque cas est différent, et la décision se prend de manière personnalisée, après étude de l’ensemble du dossier dans sa globalité.

 

 

Surveillance

Après prise en charge médico - chirurgicale d’une infection osseuse, la surveillance sera bien entendue avant tout clinique. On surveille le caractère inflammatoire de la cicatrice, les douleurs, la récupération fonctionnelle, un éventuel épanchement articulaire, etc. La surveillance est également biologique, avec des prises de sang régulières, permettant de confirmer la régression du syndrome inflammatoire biologique (globules blancs, CRP). Enfin, la surveillance comporte l’emploi régulier de radiographies, afin de vérifier la bonne tenue d’une prothèse, ou l’évolution vers la consolidation d’une pseudarthrose septique.

Quand tous ces paramètres sont favorables, et après une durée de traitement bien établie (généralement 90 jours), on autorise l’arrêt des antibiotiques. Il faut alors être vigilant quant à un éventuel réveil infectieux, et donc poursuivre la surveillance clinique et biologique pendant quelques semaines.

 

Ainsi, les infections ostéoarticulaires constituent des problèmes complexes, nécessitant une prise en charge multidisciplinaire associant, en plus du chirurgien, les infectiologues, bactériologues, anesthésistes etc. Tous décident, en collaboration, du meilleur traitement à proposer, dans la situation précise présentée par le patient.

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