Communication du Dr HAEN au congrès de la SOFCOT 2017
La SOFCOT, c'est LE congrès des Chirurgiens Orthopédistes français. L'occasion de mettre à jour ses connaissances, mais aussi de retrouver ses anciens collègues...

La présentation portait sur des travaux de recherche sur les meilleures méthodes d'imagerie dans l'évaluation de la taille des ménisques, avant greffe méniscale.
Cette étude a été réalisée à l’occasion de mon passage à l’hôpital de Versailles (Mignot) il y a quelques années.
Elle porte sur les différentes méthodes d’imagerie pouvant être utilisées pour évaluer la taille du ménisque à fournir dans le cadre d’une greffe méniscale.
Ces greffes méniscales peuvent être nécessaire en cas de syndrome post-méniscectomie. Ce syndrome désigne une situation somme toute assez rare, vu le nombre important de méniscectomies réalisées dans les années 90. À l’époque, tout dérangement du genou en lien avec une lésion méniscale justifiait d’une exploration et, très souvent, d’une méniscectomie large. Cette technique avait l’avantage d’apporter un soulagement relativement rapide. Mais, avec les années, on s’est aperçu que ces patients développaient fréquemment une arthrose précoce. (C’est pour cette raison qu’il est aujourd’hui hautement recommandé de réaliser, chaque fois que cela est possible, une suture méniscale. Ceci afin de préserver au maximum les ménisques, qui protègent le genou contre le développement de l’arthrose)
Chez des patients jeunes, avec une arthrose minime, et à condition d’avoir un genou stable et correctement axé, il est possible, en cas de syndrome post-méniscectomie, d’envisager une allogreffe méniscale. (Allogreffe signifie : greffe depuis un donneur, humain, différent du patient lui-même, par opposition aux autogreffes, et aux xénogreffes, issues d’un donneur animal). Cette intervention n’est toutefois indiquée que si la méniscectomie a été large, c’est-à-dire qu’il ne reste « plus beaucoup de ménisque » dans le compartiment.
Les allogreffes méniscales ont montré une efficacité satisfaisante dans le traitement des douleurs[1], et la survie des greffons est très satisfaisante à moyen terme (95 % à 5 ans)[2]. Néanmoins, l’efficacité pour prévenir l’évolution de l’arthrose semble plus incertaine, et semble liée à l’adéquation entre la taille du ménisque greffé et la taille du ménisque initial du patient[3], [4]. Il est donc important d’évaluer au mieux la taille du ménisque devant être greffé[5].

La méthode de référence est une méthode radiographique, dite de Polard[6]. Cette méthode repose sur une étude réalisée sur le cadavre, chez lesquels des ménisques ont été opacifiés à l’aide d’une peinture radio-opaque. Des radios ont alors été réalisées, qui ont permis de déterminer la corrélation entre la largeur de certains repères osseux (facilement visibles sur toute radiographie) et les dimensions des ménisques correspondants. Ainsi, à partir d’une radiographie standard, en mesurant la largeur du plateau tibial, et en y appliquant une équation donnée, on peut déterminer la dimension du ménisque.
Cette méthode est simple, mais elle comporte un risque d’imprécision de 10 % environ. Or, ceci peut entraîner des conséquences non négligeables…
D’autres méthodes radiographiques ont donc été proposées[7]. Mais toutes ces méthodes partagent le risque d’une certaine variabilité, au niveau de l’agrandissement ou des rotations au moment de la réalisation de la radiographie[7]–[9].
Des méthodes alternatives ont été proposées : mesure par I.R.M.[10]–[12] ou scanner. Problème, il n’est pas possible de mesurer directement le ménisque, par définition, car il a été détruit. Il faut donc, théoriquement, faire un scanner ou une I.R.M. de l’autre genou. Or il a été montré qu’il y a un risque d’inadéquation de taille entre les 2 genoux[9], [13].
L’objectif de notre étude était donc de comparer radiographies, scanner et I.R.M.
Sans trop rentrer dans les détails, voici les grands axes de l’étude qui a été réalisée.
Nous avons analysé tous les dossiers de patients opérés dans le service d’un problème complexe au niveau du genou. Nous avons conservé les dossiers de patients ayant eu à la fois radiographies, scanner et I.R.M. du même genou. Nous avons alors mesuré les dimensions des ménisques (au niveau des compartiments sains), par les 3 méthodes d’imagerie. Celles-ci étaient réalisées de manière aléatoire, et « en aveugle » (c’est-à-dire sans connaître les résultats de la mesure par une des autres méthodes d’imagerie). Nous avons également effectué différentes mesures au niveau des repères osseux, à l’aide de la radiographie et de l’I.R.M.

L’analyse de toutes ces données a permis de montrer que la mesure de la largeur des ménisques était mieux réalisée par le scanner ou l’I.R.M. que la radiographie standard. En revanche, la mesure des longueurs des ménisques était tout aussi fiable en radiographie qu’avec le scanner ou I.R.M.
Au final, la radiographie ne semble pas suffisante, et le scanner ou l’I.R.M., plus précis, nécessitent de réaliser l’examen sur le genou sain (l’autre genou), ce qui entraîne un surcoût et, on l’a vu, un risque d’inadéquation de taille entre la droite et la gauche.
Nous proposons donc une nouvelle méthode basée sur l’I.R.M. directement du genou atteint. En mesurant des distances osseuses simples, et à l’aide d’une nouvelle équation que nous avons déterminée dans notre étude, nous pouvons extrapoler les dimensions du ménisque correspondant.

Espérons que cette étude débouche sur d’autres travaux de recherche qui, in fine, permettront de mieux soigner les patients !
TXH
REFERENCES
[1] F. Rosso, S. Bisicchia, D. E. Bonasia, and a. Amendola, “Meniscal Allograft Transplantation: A Systematic Review,” Am. J. Sports Med., vol. 43, no. 4, pp. 998–1007, 2015.
[2] F. McCormick, J. D. Harris, G. D. Abrams, K. E. Hussey, H. Wilson, R. Frank, A. K. Gupta, B. R. Bach, and B. J. Cole, “Survival and Reoperation Rates After Meniscal Allograft Transplantation: Analysis of Failures for 172 Consecutive Transplants at a Minimum 2-Year Follow-up,” Am. J. Sports Med., vol. 42, no. 4, pp. 892–897, Apr. 2014.
[3] D. Lazović, C. J. Wirth, T. Knösel, F. Gossé, and H. G. Maschek, “[Meniscus replacement using incongruent transplants--an experimental study],” Z. Orthop. Ihre Grenzgeb., vol. 135, no. 2, pp. 131–137, 1997.
[4] S. V. Sekaran, M. L. Hull, and S. M. Howell, “Nonanatomic location of the posterior horn of a medial meniscal autograft implanted in a cadaveric knee adversely affects the pressure distribution on the tibial plateau.,” Am. J. Sports Med., vol. 30, no. 1, pp. 74–82, 2002.
[5] G. S. Van Thiel, N. Verma, A. Yanke, S. Basu, J. Farr, and B. Cole, “Meniscal Allograft Size Can Be Predicted by Height, Weight, and Gender,” Arthrosc. J. Arthrosc. Relat. Surg., vol. 25, no. 7, pp. 722–727, Jul. 2009.
[6] M. E. Pollard, Q. Kang, and E. E. Berg, “Radiographic sizing for meniscal transplantation.,” Arthrosc. J. Arthrosc. Relat. Surg., vol. 11, no. 6, pp. 684–7, Dec. 1995.
[7] J.-R. Yoon, T.-S. Kim, H.-C. Lim, H.-T. Lim, and J.-H. Yang, “Is radiographic measurement of bony landmarks reliable for lateral meniscal sizing?,” Am. J. Sports Med., vol. 39, no. 3, pp. 582–589, 2011.
[8] K. R. Stone, A. Freyer, T. Turek, A. W. Walgenbach, S. Wadhwa, and J. Crues, “Meniscal Sizing Based on Gender, Height, and Weight,” Arthrosc. J. Arthrosc. Relat. Surg., vol. 23, no. 5, pp. 503–508, May 2007.
[9] I. D. McDermott, F. Sharifi, A. M. J. Bull, C. M. Gupte, R. W. Thomas, and A. A. Amis, “An anatomical study of meniscal allograft sizing,” Knee Surgery, Sport. Traumatol. Arthrosc., vol. 12, no. 2, pp. 130–135, 2004.
[10] C. C. Prodromos, B. T. Joyce, B. L. Keller, B. J. Murphy, and K. Shi, “Magnetic Resonance Imaging Measurement of the Contralateral Normal Meniscus Is a More Accurate Method of Determining Meniscal Allograft Size Than Radiographic Measurement of the Recipient Tibial Plateau,” Arthrosc. J. Arthrosc. Relat. Surg., vol. 23, no. 11, p. 1174–1179.e1, Nov. 2007.
[11] T. L. Haut, M. L. Hull, and S. M. Howell, “Use of roentgenography and magnetic resonance imaging to predict meniscal geometry determined with a three-dimensional coordinate digitizing system.,” J. Orthop. Res., vol. 18, no. 2, pp. 228–237, 2000.
[12] T. L. Haut Donahue, M. L. Hull, and S. M. Howell, “New algorithm for selecting meniscal allografts that best match the size and shape of the damaged meniscus,” J. Orthop. Res., vol. 24, no. 7, pp. 1535–1543, 2006.
[13] B. Shaffer, S. Kennedy, J. Klimkiewicz, and L. Yao, “Preoperative sizing of meniscal allografts in meniscus transplantation.,” Am. J. Sports Med., vol. 28, no. 4, pp. 524–33, 2000.
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